Son lit

Written by murielle

23h30. Il dort depuis déjà depuis une bonne heure. Elle le regarde dormir, avec son air béat, bienheureux, content. Il lui suffit de s’allonger, de fermer les yeux et pfff, un soupir et il dort. Deux heures qu’il n’a pas bougé. Il dort si bien. Elle lui en veut. Elle aussi veut dormir, elle a sommeil.

Ce lit, elle l’avait choisi grand avec un matelas pas trop ferme. Elle l’avait voulu simple et rustique, en bois, avec une tête de lit toute en courbes douces et solides. Elle avait imaginé qu’elle y passerait des nuits à rêver et à dormir enfin. Elle l’avait rencontré peu après. Il venait souvent passer la nuit chez elle. Elle n’aimait pas trop aller dans son appart de vieux garçon, avec son bazar jamais rangé et la poussière sur les meubles. Il venait donc chez elle, ils se racontaient leur journée, regardaient un peu la télé. La fin du film était le signal routinier, triste et de moins en moins excitant qu’ils allaient faire l’amour. Il s’endormait tout de suite après. Pfff…

Deux? Trois mois qu’ils se connaissaient? Elle savait qu’elle ne l’aimait pas. Elle l’aimait bien, oui, mais pas assez pour accepter cette routine. Pas assez pour accepter qu’il occupe son lit. C’était son lit, ses draps, ses oreillers. Elle ne supportait plus qu’il  plie l’oreiller en deux, il allait finir par le déformer. Elle ne supportait plus le creux qu’il laissait sur le matelas. Elle le regarde dormir et elle n’a plus sommeil. Ce sera encore une nuit blanche. Ce n’est pas grave, demain elle lui dira que c’est fini entre eux. Elle s’étire, ferme les yeux et sourit. Demain elle aura son lit pour elle toute seule.

20 thoughts on “Son lit

  1. Fred says:

    Elle a raison…

  2. Anne-Marie says:

    Elle lui dira. Rien n’est mieux qu’un lit pour soi toute seule :-)

  3. Laurent says:

    Je pense comme Ramuntxo. Elle ne dira rien car elle elle est énervée sur le moment. Elle oubliera tout le matin.

  4. Nathalie says:

    Tu pensais que ce texte ferait réagir ainsi? Je comprends les deux points de vue mais je pense comme Fred qu’elle ne va pas choisir la facilité. Je pense Ramuntxo que ta version est la version de la résignation et comme le dit Fred d’un manque de respect pour soi-même et l’autre. Elle n’est pas responsable de son non amour pour lui. Elle l’aime bien mais elle ne l’aime pas assez. Un point c’est tout. Pourquoi faire durer une situation qui ne lui convient pas? Elle peut toujours réfléchir seule et régler ce doute (si doute elle a) sans cet homme à ses cotés puisqu’il n’est pas l’homme « de sa vie ». Ta version, bien écrite mais fausse, me fait penser à ces hommes qui préfèrent rester mariés à une femme qu’ils n’aiment plus plutôt que partir et ainsi se libérer d’un carcan qui ne leur convient pas. Ce qui rendrait aussi service à leur femme qui pourrait aussi « refaire leur vie » avec quelqu’un de mieux.

  5. Elias says:

    J’aime beaucoup cette nouvelle. Plus je trouve amusant les commentaires qui discutent de ce qu’elle fera au matin. C’est agréable et vivant à lire

  6. David says:

    Elle lui a dit :-(

  7. Christophe S says:

    Je suis tombé par hasard sur ce blog et cette nouvelle. J’aime beaucoup. Je me demande pourquoi c’est si difficile de partager son lit, même avec quelqu’un qu’on aime. Une relation peut être gachée par le fait de dormir ensemble. Chacun chez soi ou une chambre chacun serait la formule idéale. Je crois que même avec un homme qu’elle aime, elle trouvera difficile de partager son sommeil. Elle est de cette espèce qui ne dort bien que seule.

    • Oui, une chambre à soi comme le disait Virginia Woolf. Une chambre à soi pour écrire mais j’ajouterais, aussi pour dormir

  8. On a l’impression que ce sont deux femmes dans le lit. Et en fait, après recherches, oui. En complément, il y a « Dans Le Lit. Le Baiser, 1892. » Donc le texte, malgré ses qualités, est en léger décalage avec l’image :) :)

    • Zut alors! Je change le « il » par un « elle » ou j’enlève l’image ou le commentaire ou je je ne fais rien :-)

  9. Je ne sais pas comment tu fais pour te mettre dans la peau de tout « ce monde » que tu décris si bien… :) Cette fois j’ai trouvé une part de moi.

  10. Amaya says:

    Plus que son lit , un grand lit , le plus vaste possible , pour soi et pour l’autre :-)

    J’ai lu quelques commentaires et moi aussi je me suis dit spontanément à la fin , « elle ne le dira pas » , va savoir …. l’impression au début d’une pesanteur, d’une lassitude , elle subit , elle ne l’aime pas , mais il est là , bref …. je m’étais laissée endormir alors ? :-) Remarque c’est dans les nuits blanches qu’il y a parfois un surgissement d’idées lumineuses , des évidences , des décisions prises …

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