The Search

Written by murielle

« Ce qui est terrible, c’est que les gens s’en moquent », déplore un travailleur humanitaire de l’Union Européenne à propos de la situation désespérée des Tchétchènes au cours de l’invasion russe de 1999. C’est peut-être pour cette raison que Michel Hazanavicius a décidé d’en faire un film.

Par coïncidence, dans le sillage des récentes initiatives russes sur ses voisins, ce film dramatique tente de faire le portrait mosaïque de la souffrance dans une région peu connue ou comprise par le reste du monde.

Hazanavicius s’est inspiré du drame de Fred Zinnemann Les anges marqués, sur un garçon séparé de sa mère après la libération d’un camp de concentration et sur l’aide qu’il a reçu d’un GI américain, joué par Montgomery Clift.

the-search-affiche-filmL’histoire :

Le film se passe pendant la seconde guerre de Tchétchénie, en 1999. Il raconte, à échelle humaine, quatre destins que la guerre va amener à se croiser. Après l’assassinat de ses parents dans son village, un petit garçon fuit, rejoignant le flot des réfugiés. Il rencontre Carole, chargée de mission pour l’Union Européenne. Avec elle, il va doucement revenir à la vie. Parallèlement, Raïssa, sa grande sœur, le recherche activement parmi des civils en exode. De son côté, Kolia, jeune Russe de 20 ans, est enrôlé dans l’armée. Il va petit à petit basculer dans le quotidien de la guerre.

Les russes ne seront pas ravis par la façon dont ils sont représentés ici, à commencer par la séquence d’ouverture frappante, dans laquelle une vidéo en temps réel montre des jeunes voyous de l’armée russe agresser verbalement et provoquer un homme et une femme tchétchènes pour ensuite les tuer. Caché pendant le drame qui se déroule sous ses yeux, est l’enfant du couple, Hadji (Abdul-Khalim Marmatsuiev).

Dans cet éventail encore plus large, l’attention se porte également sur un jeune musicien de 19 ans, Kolia (Maxim Emelianov), qui, surpris à fumer de l’herbe dans la rue, est arrêté et enrôlé directement dans l’armée, où il est systématiquement brutalisé, bizuté jusqu’à ce que les coups de poing le mènent à devenir une machine à tuer endurcie et capable de toute barbarie.

La trajectoire dramatique du camp d’entrainement aux champs de combat est certainement la plus choquante ; à la fin, la transformation de Kolia semble complète, une réussite totale selon les normes et les besoins de l’armée. Et lui aussi victime sacrifiée d’une guerre sans fin.

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Par comparaison, les scènes avec les travailleurs humanitaires étrangers sont plutôt répétitives, familières et pas toujours très spectaculaires. Les forces du bien dans le film sont toutes incarnées par des femmes avec des résultats divers.

À son crédit, après des bavardages sans fin, Carole parvient enfin à faire parler le garçon traumatisé. Mais ses lamentations sur l’inaction de la communauté internationale en faveur des Tchétchènes semblent tomber dans l’oreille d’un sourd la plupart du temps, et elle et Helen (l’américaine en charge de la Croix Rouge jouée par Annette Benning) doivent admettre que leur travail courageux ne représente pas grand chose, juste une lutte acharnée dans laquelle elles peuvent gagner des petites batailles mais pas la guerre.

Un morceau du portrait composite de ce conflit épineux semble manquer. Nous voyons les envahisseurs, les victimes innocentes et accessoires des combats et les nobles étrangers qui peinent pour aider ces derniers. Mais nous ne voyons pas, à peine l’entendons nous mentionner, les rebelles tchétchènes. Comme si les référencer positivement ou négativement, en faire une présence ou un facteur dans la tragédie était trop compliquée. À l’image de ce conflit peut-être.

Mais Hazanavicius est un réalisateur doué qui sait manier la caméra et a réussi la représentation physique d’un conflit dont l’opinion publique mondiale a une impression visuelle assez maigre. Les paysages en Géorgie dans les montagnes du Caucase, sont travaillés dans des couleurs sourdes mais toujours nettement définies, avec ce qui semble être la plupart une caméra de poche, pour obtenir un look sombre mais vital comme immédiat.

Les lieux sont également bien choisis, les scènes de la ville bondée, les centres de détention et les casernes de l’armée puantes donnent une sensation physique désagréable face aux sons et à l’inconfort de l’humanité. Il y a peu de moments de calme et de soulagement même si des touches d’humour percent dans des moments isolés comme de brefs rais de lumière à travers les nuages noirs et lourds.

The Search est une sombre histoire. Une histoire dont on devrait enfin se soucier.

5 thoughts on “The Search

  1. Audrey says:

    Je l’ai beaucoup aimé. Je comprends que les passages avec Berenice Bejo soient finalement ce qui est le moins fort dans l’histoire. C’est surtout l’histoire du jeune soldat qui m’a marqué. Parce que j’ai l’impression que c’est un peu pareil partout, dans beaucoup d’armées où on fabrique des machines à tuer déshumanisées : la violence et les abus amènent la violence et les abus.

  2. Fred says:

    Tu vas me trouver stupide mais je n’ai pas compris. Tu le conseilles ou pas?

  3. Benoit says:

    Bonjour. J’ai également vu le film. C’est bien réalisé, la photographie est très bonne et les acteurs sont bien. Mais le scénario est un peu faible, quasi mélo quand il s’attarde sur Bérénice bejo. Elle a déjà fait des rôles difficiles et elle vaut mieux que ce rôle là.

  4. Je n’ai pas vu le film, mais avait suivi la manière particulièrement barbare dont les tchétchènes avaient été traités par l’armée russe, qui elle-même, se conduisait avec la dernière sauvagerie avec ses propres troupes, qui n’agissaient que « complètement bourrés ».
    Je ne sais pas si j’irais voir le film. C’est parfois dur à supporter, surtout si on sait, par différentes lectures, que ce fut largement pire que ce qui est montré. Un peu comme ces films sur la guerre d’Algérie qui ne peuvent montrer l’horreur absolue des tortures côté français (notamment sur les femmes, sujet bien caché par les autorités de l’époque), et côté FLN, qui n’était pas en reste dans ce domaine.

    • Oui quand Poutine disait qu’il irait buter les Tchétchènes jusque dans les chiottes et qu’il étaient des animaux…
      Ce n’est pas un film à voir « absolument ».

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