Okja

Written by murielle

D’une manière générale, les films sont toujours destinés à susciter une réponse du public. Qu’ils vous engagent intellectuellement, émotionnellement ou un peu des deux, voir un film c’est aussi se laisser manipuler. Mais peu de récits fictifs visent à inspirer un changement immédiat dans vos habitudes quotidiennes. C’est pourquoi Okja de Bong Joon Ho réussit sa mission : à défaut de vous faire devenir végétarien, il aura mis en lumière votre manque d’âme et votre nature psychopathe…

Okja film posterLe synopsis :

Pendant dix années idylliques, la jeune Mija s’est occupée sans relâche d’Okja, un énorme animal au grand cœur, auquel elle a tenu compagnie au beau milieu des montagnes de Corée du Sud. Mais la situation évolue quand une multinationale familiale capture Okja et transporte l’animal jusqu’à New York où Lucy Mirando, la directrice narcissique et égocentrique de l’entreprise, a de grands projets pour le cher ami de la jeune fille.

Sans tactique particulière, mais fixée sur son objectif, Mija se lance dans une véritable mission de sauvetage. Son périple éreintant se complique lorsqu’elle croise la route de différents groupes de capitalistes, démonstrateurs et consommateurs déterminés à s’emparer du destin d’Okja, tandis que la jeune Mija tente de ramener son ami en Corée.

 

D’un genre particulier merveilleux qui mêle fantaisie et littéral pastoral et hypermoderne, le deuxième film occidental de Bong Joon Ho est un projet inhabituel dès le début. Film d’un réalisateur internationalement reconnu, il est diffusé non pas dans les salles de cinéma mais sur Netflix – à la consternation du public du Festival de Cannes cette année. Et malgré un casting de qualité – Jake Gyllenhaal, Tilda Swinton, Paul Dano, Steve Yeun et Lily Collins – il ne s’agit pas d’un film facile destiné à la consommation occidentale.

Le scénario ambitieux discute de la responsabilité d’entreprise, l’éthique de la consommation de viande, le seuil acceptable de la cruauté envers les animaux et d’autres questions que vous ne vous attendez pas à trouver dans un film si simplement raconté. Est-ce un film pour enfants ?  Sans trop dévoiler, il faut dire que Bong et son co-scénariste, Jon Ronson, journaliste, cinéaste et critique social qui a écrit Êtes-vous psychopathe ?, ont fait un film que beaucoup d’enfants voudront voir, mais que peu pourront « gérer »

Certes, il y a des éléments d’intrigue qui seraient habituellement considérés comme essentiels chez d’autres cinéastes. Mais ce film est différent. Plus que ses passages topiques et allégoriques, Okja agit comme une fable sur la nature que nous détruisons et consommons, et l’absurdité avec laquelle nous nous célébrons pour cela. Les séquences autour de la ferme de Mija sont silencieuses et austères quand Okja se révèle avoir une hyper intelligence plus proche de celle d’un humain que du bétail. Il s’occupe de Mija et est réellement capable de résoudre des problèmes tout en aidant son amie humain, ce qui rend la production en masse de cochons comme Okja en quelque sorte plus cruelle.

Gyllenhaal est une vison odieuse uniquement égalée par Swinton. Cette dernière habite toujours ses rôles à la perfection, et ici, elle est une horreur de narcissisme.
Son monde, et non celui de Mija, est empli de couleurs vives, pastels, de portes en verre, de moniteurs LCD brillants et de la gaieté des partis capitalistes dans les parades vides.

Lentement et sûrement, Okja est accueilli dans des pratiques odieuses et réelles, telles que le piquage des animaux pour vérifier la qualité de la viande alors que la créature est toujours en vie. Bientôt, plus personne ne prétend s’amuser.

Malgré les excentricités du film, il existe des nuances d’humanité réelle. L’agent secret humanitaire – Paul Dano – est incroyablement sérieux dans son désir d’améliorer la vie des animaux, même par par la violence. De même, Seo-Hyun joue son rôle avec une tendre authenticité, ancrant l’extraterrestre du film dans un noyau véridique.

Tout se mélange bien dans un film bizarre et émouvant. La sentimentalité dans le troisième acte d’Okja frappe la tête du spectateur avec autant de nuance qu’un marteau sur une enclume, et s’avère toute aussi étonnante. Car voici une bizarrerie de styles et de cultures, et un mélange de sensibilité et d’esthétique, qui nous amènent à comprendre qu’un animal peut aussi être plus qu’un simple animal de compagnie.

 

 

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