Prendre les loups pour des chiens
J’aime les romans noirs. La preuve ici, là ou encore là par exemple. Et j’aime beaucoup Hervé le Corre. Et vlà t’y pas qu’Après la guerre et plein de prix, il revient avec un roman tout aussi bon : Prendre les loups pour des chiens.
L’histoire : Franck, environ 25 ans, sort de prison après un braquage commis en compagnie de son frère aîné. Il est accueilli par une famille toxique : le père, fourbe, retape des voitures volées pour des collectionneurs, la mère, hostile et pleine d’amertume, la fille Jessica, violente, névrosée, animée de pulsions sexuelles dévorantes et sa fille, la petite Rachel, mutique, solitaire et mystérieuse, qui se livre à ses jeux d’enfant. Nous sommes dans le sud de la Gironde, dans un pays de forêts sombres et denses, avec des milliers de pins qui s’étendent à perte de vue, seulement ponctués par des palombières. Dans la moiteur, la méfiance et le silence, un drame va se jouer entre ces êtres désaxés.
Et on est dans le pur noir, façon roman noir américain à la Jim Thompson. Prendre les loups pour des chiens, c‘est la description de la vie poisseuse dans la France rurale, là où (sur)vivent les criminels et les voyous, mais aussi les hommes ordinaires que la vie transforme en salauds. Et il nous entraîne dans une descente aux enfers, dans un monde odieux, infâme et abject, nous livrant ici et là, par petite touches, quelques bouffées d’air pur et de lumineuses éclaircies.
Il y a de la chaleur, du sexe (une première chez Le Corre), de la violence mais c’est aussi et surtout un vrai roman noir comme si merveilleusement défini par Marcel Duhamel, fondateur de la Série Noire : « Comme dans les bons films, les états d’âmes se traduisent par des gestes, et les lecteurs friands de littérature introspective devront se livrer à la gymnastique inverse. Il y a aussi de l’amour — préférablement bestial — de la passion désordonnée, de la haine sans merci ».
« Ça fait des années qu’elle le connaît. Je sais pas trop d’où. Il lui fournit sa came gratis. Elle le paye à sa façon, je te fais pas un dessin. Je sais pas exactement ce qui vous est arrivé hier soir, mais ça l’a fait plonger alors elle va au ravitaillement. Dans ces cas-là, quand on ne va pas la récupérer, elle revient huit jours après complètement cassée, folle à lier. Sinon, elle ne consomme plus. Un joint par-ci, par-là, et c’est tout. Faut juste supporter ses changements d’humeur, comme pour la météo. Le matin, avec elle, tu sais jamais s’il va tomber des seaux d’eau ou s’il fera beau, et même si ça durera toute la journée. Et les seaux d’eau, quand ils sont vides des fois tu les prends sur la gueule… »
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