La musique de Sufjan Stevens et moi

Written by murielle

La musique et moi c’est une grande histoire d’amour. Peut-être finalement plus que la littérature. C’est vers elle que je me tourne tout le temps. Et celle de Sufjan Stevens en particulier.

Citer un groupe ou chanteur préféré quand la question est posée est plutôt difficile. Quoique Radiohead est toujours le nom qui me vient en premier. Ensuite, c’est plus compliqué. « Ça dépend » est la réponse la plus appropriée. Mais tout de même, si Otis Redding est là quelque part dans les premiers, il y a également un autre américain, Sufjan Stevens.

 

Connaissez-vous la musique de Sufjan Stevens ? Oui, si vous écoutez les musiques du jour que je poste. Non ? Eh bien, laissez-moi vous dire quelque chose, c’est beau et étrange, profondément spirituel et tout aussi profondément morbide. Et j’aime ça. J’aime tous ces trucs amusants : beauté, étrangeté, spiritualité et morbidité. Des thèmes classiques.

Peut-être aussi parce que je n’aime pas les grosses voix et que la sienne est douce presque murmurée. Parce qu’il écrit des chansons qui ont du sens et qu’il joue de nombreux instruments dont le banjo, qu’il sait mêler folk et electro. Qu’il joue, produit, fait  tout. Et que ce tout m’enchante.

Peut-être aussi parce que c’est un artiste qui dévoile son âme sans ne rien révéler du tout. Sa musique est aussi intime qu’élusive. Il a créé un espace où s’exprimer est bien plus facile et plus beau qu’une vraie conversation.

Peut-être parce qu’il reste dans l’ambiguïté. Il est chrétien et si ses chansons portent des métaphores et allusions bibliques, elles vont au delà d’une façon de penser. Parce que finalement parler de Jésus c’est aussi parler d’amour et qu’il en parle bien. Jusqu’à nous faire douter. Ne plus savoir si cet amour qu’il ressent est uniquement pour Dieu, une femme ou pour un autre homme.

Tout amour n’est pas déclaré ou crié. Une voix douce est toute aussi valable, chuchotée dans les premiers pas de l’expression de soi – codifiée pour qu’un seul être comprenne – ou même enveloppée dans l’autocensure.

Oh, oh oh woe is me
The first time that you touched me
Oh, will wonders ever cease?
Blessed be the mystery of love

Parce qu’il sait le rejet « All of me wants all of you ».

Peut être parce que Sufjan Stevens peut chanter sur sa vie, enfant abandonné par une mère qui souffrait de dépression et schizophrénie, dans un album déchirant Carrie & Lowell, qui parle de sa mort en 2012, et de son beau-père devenu son ami. Qu’il sait parler de ces sentiments, ces regrets, ce vide, ces zones d’ombre, de ce qui n’est pas tangible mais nous construit.

I should have known better
To see what I could see
My black shroud
Holding down my feelings
A pillar for my enemies

Parce qu’il peut même parler au nom d’un clown tueur et violeur en série d’enfants des années 70 dans l’album John Wayne Gacy Jr.

And in my best behaviour / I am really just like him / Look beneath the floorboards / For the secrets I have hid.

Peut-être parce qu’il sait que les mots aident, accompagnent mais n’apportent pas toujours de résolution.

And I would say I love you / But saying it out loud is hard But you are life I needed all along / I think of you as my brother / Although that sounds dumb / Words are futile devices

Peut-être parce qu’il est un des seuls qui chante Noël avec sérieux et qu’on pourrait presque y croire aussi.

Peut-être parce qu’il suffit de 2 minutes 11 pour tomber amoureuse.

Peut-être parce qu’il est un musicien talentueux, avec un don pour écrire sur les sentiments, leur futilité ou leur profondeur. Parce que finalement, quel que soit l’objet de son amour, tout passe, tout change et grandit… Et on continue de faire des erreurs.

I fell in love again
All things go, all things go
Drove to Chicago
All things know, all things know

Et peut-être parce qu’arriver à faire une chanson sur le suicide qui est à la fois pudique et crue demande du talent.

Should I tear my eyes out now?
Everything I see returns to you somehow
Should I tear my heart out now?
Everything I feel returns to you somehow
I want to save you from your sorrow

The only reason why I continue at all
Faith in reason, I wasted my life playing dumb
Signs and wonders, sea lion caves in the dark
Blind faith, God’s grace, nothing else left to impart

Enfin, parce que chanter un refrain sur notre propre mortalité est tout de même tordu et morbide… Et Sufjan Stevens y arrive.

Well you do enough talk
My little hawk, why do you cry?
Tell me what did you learn from the Tillamook burn?
Or the Fourth of July?
We’re all gonna die
We’re all gonna die

Parce qu’il travaille en collaboration avec des artistes tout aussi bons pour produire un album sur la mythologie, l’astrologie, l’astronomie, la science et les subtilités de l’âme humaine… Et que c’est aussi dérangé que bon.

Parce qu’il a écrit sur tout ce qui me touche et que cette respiration, cet infime souffle à la fin d’une chanson est encore du Sufjan Stevens.

So can we pretend sweetly
Before the mystery ends?
I am a man with a heart that offends
With its lonely and greedy demands
There’s only a shadow of me, in a manner of speaking I’m dead 

Et malgré son côté « Brooklyn hipster », parce qu’il est authentique et sincère.

2 thoughts on “La musique de Sufjan Stevens et moi

  1. Nathalie says:

    Il est très beau! J’ai regardé le concert et la fin est une surprise :) C’est un peu toujours la même chose à mon goût mais il a du talent, c’est certain!

    • Oui la reprise de Drake est plutôt sympa. Je ne trouve pas que sa musique soit toujours la même chose mais je comprends qu’on puisse aimer quelque chose de plus bruyant :-)

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