La maison dorée. Une suite au Miniaturiste
Après deux romans, Jessie Burton est revenue dans l’univers du Miniaturiste avec son nouveau roman La maison dorée. Il est toujours délicat de parler de la suite sans spoiler le premier tome. Disons que le Miniaturiste s’est terminé par une naissance et deux morts. Et un nouvel ordre imposé dans la maison Brandt.
Ceci dit, un résumé du Miniaturiste est proposé à la première page…
Nous faisons maintenant un bond en avant de 18 ans dans un Amsterdam très différent. Des guerres et de mauvais investissements ont affaibli les Pays-Bas et la ville a changé. On retrouve Nella Oortman. Elle vit toujours dans la maison de son mari décédé, Johannes Brandt, sur le canal Herengracht à Amsterdam, avec Cornelia la cuisinière, le serviteur autrefois esclave de Johannes, Otto, et Thea, l’enfant qu’Otto a eu avec la sœur de Johannes, Marin.
Jusqu’ici tout semble assez familier, mais 18 ans se sont écoulés. Nella a maintenant 37 ans et le bébé Thea est une jeune femme. Les trois adultes non apparentés se sont liés et forment une sorte de famille après la mort de Marin et Johannes. Mais leur fortune diminue et la maison autrefois somptueuse ne contient plus grand chose sinon une atmosphère étrange – à la fois claustrophobe et en proie à la tragédie : « la joie dans cette demeure est sans cesse entremêlée d’une peur de la perte ».
La famille est une curiosité – « l’homme noir qui vit sur le Herengracht, sa fille métisse et la veuve de l’homme noyé par la ville pour ses supposés péchés » – et le statut de Thea en tant qu’héritière noire est troublant pour la classe supérieure. Nella tient à résoudre les problèmes d’argent de la famille en lui arrangeant un mariage lucratif, mais Thea résiste. Tout comme sa tante l’a fait autrefois, Thea croit au véritable amour. Contrairement à Nella, elle croit l’avoir trouvée, dans les bras d’un beau décorateur de théâtre.
Le roman commence avec l’anniversaire de Thea qui fête donc ses 18 ans. Thea est maintenant la narratrice de ce livre, comme Nella – sa « tante » – était le moteur du roman précédent. Et c’est une histoire miroir que l’on lit.
Les deux ingénues adolescentes est la grande force de La maison dorée : comme Nella, le parcours de Thea est celui d’une respectabilité fragile. Comme Nella, la fortune de Thea repose sur son mariage. Comme Nella, Thea reçoit de mystérieux cadeaux d’un « miniaturiste », un artisan ténébreux dont les figures de cire évoquent les secrets et les rêves des jeunes femmes. Mais là où Miniaturiste a embrassé la perspective de Nella, La maison dorée encadre Thea à travers la maturité et l’expérience de sa tante. La révélant ainsi vulnérable, faillible et naïve.
Nella se lève, le cœur au bord des lèvres. Elle sent en elle une fin et un commencement, deux histoires se reliant pour former un cercle infini. Elle sait où se trouve Thea, et elle doit aller l’y chercher seule.
Cet écho déformé du premier roman est intelligent et malin. Nella et Thea deviennent plus complètes et plus complexes que ce qu’on peut lire dans les romans historiques sur les jeunes héroïnes courageuses. Le roman en est plus fort et bien plus riche.
Le monde d’Amsterdam du début du XVIIIe siècle est intelligemment évoqué, mais l’insistance de Nella sur le fait que Thea « voit le monde, mais ne s’y plonge pas » est révélatrice. Un peu comme ces expats qui vivent dans un pays étranger mais n’intériorisent aucune de sa culture et de ses coutumes. Comme une réflexion froide de ce qui les entoure sans jamais s’intégrer. Ces personnages ont une sensibilité presque moderne et décalée dans un passé problématique.
L’expression d’Otto est lugubre. Il ouvre la porte et la lumière du soleil envahit la maison. « Alors vous avez oublié ce que c’est, d’avoir dix-huit ans. Au contraire, songe Nella : une partie du problème vient de ce que je me souviens trop bien de mes dix-huit ans, et ces souvenirs sont une malédiction depuis trop longtemps.
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