Brève histoire de sept meurtres
Pour info, cet article date de l’année dernière mais il vient d’être publié en francais. Oui, je fais ma snob, je l’avais lu en VO.
Ce livre c’est Brève histoire de sept meurtres par le jamaïcain Marlon James. Roman qui a permis à son auteur de remporter le fameux Booker Prize 2015.
Marlon James raconte l’histoire de la tentative d’assassinat par la CIA de Bob Marley (jamais cité nommément, il est « le chanteur »), et de ses conséquences. Mais peut-être plus important encore, il raconte l’histoire de la Jamaïque dans les années 70 et au début des années 80, quand les armes ont inondé le pays, quand les agents de la CIA ont pris résidence, et que l’île est passée par un de ses moments le plus violent de son histoire. L’histoire du pays est une histoire qui mérite d’être racontée, et une histoire sur la Jamaïque qui ne prend pas seulement place en Jamaïque.
Le casting est large, il y a environ 75 personnages présentés au début du livre dont beaucoup vont et viennent, puis repartent au fil de pages le temps de raconter un bout de leur histoire. C’est un patchwork d’expériences le tout dans un mélange d’anglais et de patois jamaïcain si familier aux oreilles des résidents de London Brixton…
Ça commence avec la pause que prennent le chanteur et ses musiciens dans sa maison le 3 décembre 1976. Deux voitures s’arrêtent et sept hommes – ou plus – entrent dans la cuisine et tirent dans le tas. Marley est touché superficiellement, son manager plus sérieusement, Rita prend un fragment de balle dans le crâne, etc. La police arrive plus tard quand les assaillants ont pris la fuite.
Tous ont survécu. Le sort des sept – huit – tireurs est différent, d’où le titre… Huit tireurs avec un nom ou surnom ; Josey Wales, Weeper, Bam-Bam, Demus, Heckle et Funky Chicken, plus « deux hommes de Jungle, un gros, un maigre ». (Jungle étant le nom donné à l’un des multiples développements de logements sociaux qui poussaient dans Kington dans les années 60-70).
C’est un roman qui se lit comme American Tabloid de James Ellroy se lit pour l’assassinat de Kennedy. Avec des touches de vérité et de fiction mêlées. Avec aussi un fait divers intéressant.
Si l’histoire commence avec Bob Marley, elle se termine en effet avec la combustion de Josey Wales, le pendant fictif de Lester Lloyd Coke, surnommé « Jim Brown », un chef de gang de Kingston à l’origine d’un massacre dans une crack house à New-York et qui est mort mystérieusement brûlé dans sa cellule de prison en 1992.
Son fils et digne héritier, Christopher ‘Dudus’ Coke, est un baron de la drogue, recherché par la police et l’armée quand plus de 70 civils furent tués dans un raid raté en 2010 à Tivoli Gardens.
Les histoires sont fascinantes et les conteurs le sont encore plus. Loin des clichés et proche de l’os, Marlon James a su me saisir et me faire voyager à travers trois décennies et deux continents.
Il n’a aucune difficulté à construire une narration plausible, qui connecte l’attaque aux aspects multiples de l’histoire jamaïcaine et l’intrigue est fascinante. Les personnages sont librement imaginés même quand ils sont censés représenter des personnes ayant existé. À l’exception de Bob Marley, qui est seulement vu à travers les yeux des autres narrateurs.
C’est peut-être là la raison de son prix littéraire. Il a su mêler la prose et le dialecte puis la fiction et la réalité pour les rendre indissociables, poétiques, vivants et merveilleux.
Listen.
Dead people never stop talking.
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4 commentaires
Francis Palluau
Et ils n’en ont pas encore fait un film ? Le sujet me parait pourtant porteur…
murielle
Oui je ne sais pas.
burntoast4460
J’ignorais cette tentative de meurtre. Je dois dire que je en suis jamais trop intéressé à BM.
Benoit
Je vais attendre qu’il sorte en français avec l’envie de le lire!