Le travail c’est trop dur

Written by murielle

Il y a eu le livre Les visages écrasés de Marin Ledun, puis le film Carole Mathieu réalisé par Louis-Julien Petit avec Isabelle Adjani dans le rôle titre. C’est une histoire de souffrance au travail qui raconte le quotidien de milliers de travailleurs en France et certainement ailleurs.

L’histoire est finalement banale. Les usines modernes comme les centres de télétravail, les plateaux open space où chaque fourmi/employé joue sa vie chaque jour. La plupart est intérimaire, interchangeable et jetable quand elle n’est plus capable d’assurer la pression.

Je sais. Je le vois tous les jours. Dans mon travail. J’en suis témoin mais plus victime. Peut-être parce que j’ai déjà ce Graal CDI.Peut-être parce que je chéris un peu trop maladivement ma « liberté » au travail et dans ma vie personnelle pour accepter tout et n’importe quoi. Peut-être enfin, parce que même si je partage un open space avec d’autres, je suis une de celles qui n’a pas trop la pression.  Je ne passe pas d’appels, je n’ai pas de « cadences » à suivre et j’ai peu de comptes à rendre.

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Je lis la rédaction des autres j’accompagne les rédacteurs web qui en ont besoin. Je suis tranquille. Je fais mon boulot, je travaille avec des gens agréables, je papote et ris avec les autres, je prends mes pauses en bonne compagnie. Puis quand je quitte mon bureau, je passe à autre chose. Cela dit, je continue parfois à parler du travail, des plateaux ultra chauffés, de quelques collègues qui m’agacent… de mes frustrations ou de mon ennui. Mais plus d’une souffrance quelconque. Je ne veux pas jouer ma vie au travail.

 

Mais je la vois chez d’autres et je suis partagée entre la colère et le dégoût, envers les entreprises qui usent et abusent d’être humains et des politiques qui ne protègent pas les citoyens. Le burn out (syndrome d’épuisement professionnel) existe depuis des années. Il est dénoncé, il est expliqué, il est débattu. Et rien n’est fait. Des hommes et femmes souffrent et, finalement, on s’en fout. Un suicidé, un arrêt maladie, un démissionné ou un renvoyé, combien souffre en silence ?

Sisyphe
Sisyphe

Tenez par exemple là ou je travaille. Sur chaque pôle il y a un.e leader et des leaders pour chaque équipe. Chaque leader a la pression du dessus sur les cadences à respecter, sur les tâches à exécuter, le script à suivre, et puis il y a les notes des clients.

Eh oui. Téléconseillers et chefs de projet bossent dans des conditions de travail limites. Ils sont notés par leur leader et leader de leader, mais aussi par leur client qui sera sans doute mécontent de leur travail. Le client n’est plus roi, il est le boss de l’autre, le dominant, il note.

Le travail aura été fait avec le minimum de moyens, de temps et de support. Parce que même si le leader veut aider, lui aussi est tenu à des cadences et des pressions… Et tout ça dans un climat de paranoïa puisque chaque e-mail est en « cc » aux leaders, chaque appel est enregistré puis réécouté, chaque pause est minutée grâce à un logiciel… Répéter ad nauseam…

Il s’agit de personnes qui ont besoin de garder leur travail face à un consommateur/client/usager dans la position de bienfaiteur ou délateur. Bref, une situation insupportable pour beaucoup. Chaque mauvaise note est signalée, remise en question. Qu’est-ce qui ne va pas avec le salarié ? Quel est son problème ? On va faire alors un point de recadrage.

Le problème ? C’est la déshumanisation du monde du travail. D’un système où chacun d’entre nous est victime et/ou bourreau. Où la souffrance est ancrée dans l’ADN de l’employé prêt à la subir voire même à la reproduire plus ou moins inconsciemment. Le problème n’est pas le travailleur…

Travail. Cette ignoble invention de l’homme.

Pan Bouyoucas

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